Dans l’univers des séries policières, chaque inspecteur de légende a besoin d’un bras droit à la hauteur. Kevin Dobson, alias Bobby Crocker dans Kojak, incarne ce partenaire idéal : une boule d’énergie, loyal, déterminé, toujours prêt à faire bouger les lignes. Mais pour saisir toute la singularité de Crocker, rien de tel qu’un détour par l’univers feutré de Derrick et de son fidèle Harry Klein, l’autre bras droit culte du petit écran.
Deux parcours, deux philosophies
Kevin Dobson n’a pas eu un chemin tout tracé vers la célébrité. Gosse du Queens, il a enchaîné les petits boulots avant de décrocher, à force de ténacité, le rôle de Bobby Crocker. Cette persévérance, cette envie de s’imposer, se ressentent dans chaque scène de la série Kojak. Crocker, c’est la jeunesse, la fougue, la volonté de s’imposer dans un commissariat new-yorkais où la violence, la crasse et la corruption font rage. Il prend des risques, ose l’initiative, défend ses idées face à son supérieur. Son énergie contraste avec la sagesse et l’expérience de Kojak, créant un duo dynamique et complémentaire.

Face à lui, Harry Klein (Fritz Wepper) incarne une autre forme de loyauté. À Munich, dans la série Derrick, il est l’ombre rassurante de l’inspecteur : fidèle, discret, presque effacé. Ici, tout est question de retenue et de constance. Klein ne cherche pas à briller, il accompagne, il soutient, il rassure. La série elle-même cultive la stabilité, la routine, et même une certaine mélancolie… et pour certain de l’ennui.
Crocker et Klein : deux faces du même métier
Crocker évolue dans le tumulte de New York, une ville bruyante, imprévisible, où chaque coin de rue peut devenir le théâtre d’une nouvelle affaire. À l’opposé, Klein arpente une Munich calme et policée, presque hors du temps, où l’ordre et la discrétion semblent régner en maîtres. Ce contraste géographique façonne leur manière d’être et de travailler.
Dans l’action, Crocker vit chaque enquête à 200 à l’heure. Il laisse parler ses émotions, s’engage personnellement, et n’hésite pas à se mettre en danger pour faire avancer une investigation. Klein, lui, adopte une posture radicalement différente : stoïque, discret, presque impassible, il préfère garder ses sentiments pour lui et avancer avec prudence.

Sur le terrain, Crocker est un homme d’action. Il court, se bat, fonce dans le tas sans hésiter, prêt à tout pour résoudre une affaire. Klein, au contraire, privilégie l’observation et l’analyse. Il agit dans la retenue, pesant chaque geste, chaque mot, avant de passer à l’action.
Dans la dynamique du duo, Crocker ose contredire Kojak, propose des idées nouvelles et prend des risques, quitte à bousculer la hiérarchie. Klein, de son côté, fait preuve d’une fidélité sans faille envers Derrick. Il suit les ordres, reste discret et ne cherche jamais à s’imposer ou à sortir de l’ombre de son supérieur.
Le rythme des enquêtes reflète aussi leurs différences. Chez Kojak, chaque affaire est une véritable course contre la montre, pleine d’adrénaline et de rebondissements. Dans Derrick, le temps s’étire, la tension est avant tout psychologique, et la patience devient la principale vertu des enquêteurs.
L’esthétique des deux séries accentue encore ce contraste. Kojak, c’est la couleur, le mouvement, la rue en ébullition. Derrick, c’est la sobriété, les bureaux gris, la mise en scène statique, presque contemplative.
Enfin, la relation au public diffère elle aussi. Crocker séduit par son charisme, sa fougue et son énergie communicative. Klein, lui, rassure par sa constance, sa discrétion et sa présence apaisante, devenant le repère silencieux d’un univers policier feutré.
Ce que Crocker apporte, Klein n’oserait jamais
Là où Klein s’inscrit dans la tradition, Crocker incarne la nouveauté, l’audace, le mouvement. Il n’accepte pas la routine, il veut que ça bouge, que ça avance, quitte à bousculer les habitudes. Ce contraste illustre deux visions du métier de policier à la télévision : l’une tournée vers l’action et la remise en question, l’autre vers la stabilité et la réflexion.
Un héritage qui marque la télévision
Après Kojak, Kevin Dobson poursuit sa carrière avec succès, dans le rôle de Mack dans Côte Ouest (Knots Landing), ou encore un flic tenace (Leo McCarthy) dans la série FX, effets spéciaux où il confirme son talent et sa capacité à incarner des personnages forts. Mais pour des millions de téléspectateurs, il restera à jamais Bobby Crocker : le bras droit énergique, loyal, et toujours prêt à relever les défis.
Crocker l’éclat dans la grisaille
Si Derrick et Klein rassurent par leur constance, Kojak et Crocker fascinent par leur intensité. Kevin Dobson, dans le rôle de l’inspecteur, a su imposer une figure de partenaire qui ne se contente pas de suivre le lieutenant, mais qui ose, qui s’affirme, et qui, à sa façon, fait évoluer l’image même du duo policier à la télévision.
Entre la routine allemande et l’effervescence new-yorkaise, à contrario de Klein, Crocker restera toujours celui qui fait bouger les lignes. Un vrai modèle de persévérance et d’authenticité.