Si vous pensiez que la mode, c’est du propre et du repassé, Norma Moriceau va vous faire changer d’avis à coups de cuir brûlé et de métal rouillé ! Avec Mad Max II, Mad Max III et Crocodile Dundee, la costumière australienne a inventé un look culte, furieusement déjanté, qui a retourné la pop culture. En ce qui concerne Mad Max II « The road warrior » chaque costume est une punchline visuelle : ici, la poussière, la sueur et la récup’ sont les nouveaux codes du cool, et chaque personnage devient une icône de la débrouille extrême. Son héritage, c’est d’avoir transformé le chaos en podium, la survie en manifeste fashion, et d’avoir prouvé que le style, c’est avant tout une question d’attitude.

Norma Moriceau et Mel Gibson

Cuir craquelé, rouille et apocalypse : le manifeste fashion selon Moriceau

Norma Moriceau ne voulait pas de vêtements neufs, lisses ou sans histoire. Son credo, c’était la récup’, le vécu, le bricolage en mode survie.

« Les costumes de Mad Max devaient avoir l’air d’avoir été trouvés, volés, rafistolés, jamais achetés neufs. »
— Norma Moriceau, à propos de sa démarche pour Mad Max 2 (source : interviews de production, archives presse australienne)

Le cuir est partout, mais jamais clinquant : vestes éclatées, pantalons rapiécés, harnais bricolés, tout semble avoir traversé des années de tempêtes de sable et de violence. Chaque pièce est patinée, brûlée, déchirée, tatouée par le temps et l’aventure. Le cuir, chez Moriceau, c’est la peau des survivants, la preuve qu’ils ont résisté à tout. Ce n’est pas juste un choix esthétique, c’est une déclaration : dans le monde de Mad Max, ce que tu portes raconte comment tu as survécu.

Le gang de Lord Humungus

Et la rouille, alors ? C’est la signature de l’apocalypse. Plaques d’acier, chaînes, boulons, tout ce qui traîne dans la casse devient accessoire ou ornement. La rouille n’est pas une honte, c’est un trophée, la marque d’un monde où tout se recycle, où chaque détail raconte une histoire de débrouille et de résistance.

« Je voulais que chaque personnage ait l’air d’avoir survécu grâce à ce qu’il a pu récupérer, transformer, détourner. Le cuir, le métal, la rouille racontent leur histoire. »
— Norma Moriceau, propos rapportés dans le documentaire « The Madness of Max »

Moriceau a ainsi inventé une esthétique où chaque costume est un patchwork de survie, une œuvre d’art déglinguée, et où la frontière entre vêtement et armure s’efface dans la poussière.

Des looks culte : Wez, Humungus, Toadie, Pappagallo et la femme guerrière

Impossible de parler Mad Max sans évoquer la galerie de styles frappadingues imaginée par Moriceau, où chaque personnage devient un symbole visuel, reconnaissable entre mille.

Vernon Wells est ‘Wez’ – 1982

Wez : le punk du désert, version furie totale. Avec ses épaulières de foot US déglinguées, ses chaps en cuir noir éclaté, ses bottes de motard renforcées de chaînes et de clous en passant par son string en cuir (et oui), il incarne la rage brute et la sauvagerie. Les plumes, les tatouages de guerre et les accessoires bricolés ajoutent une dimension tribale et anarchique à son look. Wez, c’est la violence à l’état pur, le DIY poussé à l’extrême, un mélange de Mad Max et de punk hardcore qui fait de chaque apparition une explosion visuelle.

Kjell Nilsson est ‘Lord Humungus’ – 1982

Humungus : le boss SM du wasteland, véritable icône BDSM sous stéroïdes. Son harnais de cuir clouté, son slip de gladiateur, son masque de hockey chromé et ses muscles huilés en imposent. Il incarne la domination, la folie et la puissance brute. Son look, c’est le fantasme post-apo poussé à fond, entre Mad Max et rave indus, un mélange de peur, de fascination et de provocation. Il ne se contente pas d’être le chef des pillards, il est leur dieu, leur totem vivant.

Max Phipps est ‘Toadie’ – 1982

Toadie : bras droit pathétique et flagorneur du Seigneur Humungus, Toadie est l’incarnation même du loser du wasteland, et Norma Moriceau s’en est donné à cœur joie pour le rendre inoubliable. Son costume, à mille lieues de la puissance brute des autres pillards, est un patchwork de récup’ dépareillée : veste molletonnée orange trop grande ornée de logo de vieilles bagnoles, manches pendantes, cape en renard, lunettes de protection de travers, gants dépareillés et accessoires absurdes, comme ce mégaphone bricolé qui ne le quitte jamais. Toadie semble avoir ramassé tout ce que les autres ont laissé derrière eux, accumulant les couches sans logique ni élégance, ce qui accentue son côté bouffon et maladroit. Son look, c’est le clown triste du désert, le type qui rêve d’être un chef mais qui finit toujours par se ridiculiser. Grâce à Moriceau, Toadie devient un personnage immédiatement reconnaissable, preuve que même les seconds couteaux du wasteland ont droit à leur moment de gloire fashion… version looser, mais inoubliable !

Michael Preston est ‘Pappagallo’ – 1982

Pappagallo : le chef des survivants, version roots et réparateur. Contrairement aux autres, il porte des vêtements en lin clairs, mitaines en cuir blanc, polo sans manche en peau de yack, tout est fait de matières naturelles, lumineuses et terreuses. Son style, plus sobre mais tout aussi réfléchi, incarne la résistance organisée, la volonté de reconstruire quelque chose dans le chaos. Pappagallo, c’est l’homme qui croit encore à l’humanité, même quand tout s’effondre, et son look traduit cette foi dans la communauté et la reconstruction.

Virginia Hey est ‘Warrior Woman’ – 1982

La femme guerrière : cotte de maille de laine blanche, armure de cuir blanc, épaulières de quarterback blanches, silhouette affûtée et posture de combattante. Elle mixe puissance, élégance et fonctionnalité, prouvant que dans le wasteland, les femmes aussi imposent leur style et leur force. Son look, c’est la sororité badass, l’immaculée conception…la preuve que la survie n’est pas qu’une affaire de muscles, mais aussi de courage, d’intelligence et d’attitude. Elle incarne la résilience féminine, la solidarité et la détermination.

Chaque costume, chez Moriceau, est un manifeste. Ils opposent l’anarchie punk et rouillée des pillards à la sobriété réparatrice des survivants, tout en donnant à chaque personnage une identité visuelle forte, immédiatement reconnaissable et inoubliable.

L’influence punk, S&M et 100% récup’

Norma Moriceau a puisé dans la scène punk londonienne, le S&M, le rock, et le monde de la récup’ sauvage. Clous, chaînes, asymétries, coupes déstructurées, tout est permis. Les costumes sont des armures psychologiques, des manifestes de survie, des œuvres d’art déglinguées qui racontent la folie, la liberté et la créativité de ce monde sans règles.

Le gang de Lord Humungus

« Pour moi, le costume, c’est une armure psychologique avant d’être un vêtement. »
— Citation rapportée par Mel Gibson lors d’un hommage à Norma Moriceau (source : bonus DVD Mad Max Anthology)

Moriceau a ainsi ouvert la voie à une mode où l’on ose tout, où chaque détail compte, où la personnalité explose à travers la récup’ et la transformation. Son style a influencé la pop culture, la mode alternative, les festivals, les jeux vidéo, et même les podiums de haute couture. Elle a prouvé que la mode, c’est avant tout une question de caractère, de débrouille et d’audace.

Quand l’Italie recycle Mad Max : c’est du post-apo sans la magie Moriceau

Après le raz-de-marée Mad Max, le cinéma bis italien des années 80 s’est rué sur le filon post-apocalyptique, en recyclant à la chaîne l’esthétique cuir, ferraille et poussière inventée par Norma Moriceau. Mais là où Moriceau créait des silhouettes iconiques et crédibles, les productions transalpines se sont souvent contentées d’un simple déguisement, avec beaucoup moins de réussite et un sens du détail… disons, très approximatif.

Le look de 2019 après la chute de New York

Dans des films comme Les Guerriers du Bronx, Les Nouveaux Barbares ou 2019, Après la Chute de New York, les gangs motorisés et les survivants arborent des costumes censés rappeler Mad Max : cuir synthétique, armures bricolées, casques de moto repeints, et accessoires piochés dans les surplus militaires ou les rayons jouets. Mais à l’écran, le résultat frôle parfois le carnaval : looks dignes des Village People sous acide, armures blanches façon Stormtrooper du dimanche, ou patchworks de fringues colorées et kitsch qui font plus penser à une convention cosplay qu’à un univers de survie crédible.

et version Guerriers du Bronx

Si certains films italiens affichent une imagination débordante et un vrai plaisir dans l’excès visuel, la magie n’opère pas : les costumes manquent de vécu, de patine, de cette authenticité cradingue qui faisait toute la force de Mad Max. Là où Moriceau racontait une histoire à travers chaque couture, les Italiens se contentaient souvent d’aligner les clichés, avec des budgets riquiqui et une approche plus « déguisement » que « costume ». Résultat : une avalanche de nanars cultes, drôles et attachants, mais à des années-lumière du style post-apo ultra-cool et crédible imposé par la prêtresse du cuir australien.

L’héritage : la mode post-apo, c’est le nouveau cool

Grâce à Norma Moriceau, la mode post-apocalyptique n’est plus synonyme de misère, mais de créativité et de liberté. Son esthétique, faite de cuir craquelé, de métal rouillé et de récup’ inventive, a contaminé les podiums, les festivals, les jeux vidéo et même les défilés de haute couture. Aujourd’hui encore, le style Mad Max inspire les créateurs, les stylistes et tous ceux qui veulent affirmer leur différence.

Chez Moriceau, chaque costume est une déclaration d’indépendance, une ode à la débrouille stylée. Dans Mad Max, la mode, c’est la survie. Et la survie, c’est la débrouille… ultra-cool.

« Dans Mad Max, la mode, c’est la survie. Et la survie, c’est la débrouille stylée. »

Norma Moriceau a fait de la poussière, du cuir et de la rouille les nouveaux codes du cool. Son héritage, c’est un monde où le chaos devient une scène de mode, où chaque cicatrice est une médaille, et où le style est une arme.
Bienvenue dans l’ère du fashion wasteland : déjanté, libre, et toujours stylé à mort.

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