Moments 80’s : Centerfold – La pop irrévérencieuse et nostalgique du J. Geils Band

« Centerfold », sorti en 1981, est le single le plus iconique du J. Geils Band, extrait de leur dixième album Freeze Frame. Écrit par le claviériste Seth Justman, ce morceau marque un tournant majeur dans la carrière du groupe, les propulsant en tête des charts : numéro 1 au Billboard Hot 100 pendant six semaines consécutives début 1982, il atteint aussi la première place en Australie et au Canada, et la troisième place au Royaume-Uni.

John Warren Geils Jr. dit J. Geils (1946-2017) – Getty Images

Fondé en 1967, le J. Geils Band s’est d’abord imposé comme une référence du blues-rock et du rhythm & blues, mais avec « Centerfold », le groupe amorce une mue vers une pop new wave accrocheuse et dansante, dans la veine de ce que faisaient The Cars ou The Police à l’époque. L’utilisation de claviers plus brillants, d’une batterie « snappy » et d’un gimmick de guitare efficace, combinés à un refrain « na-na-na » immédiat, forment la recette imparable du titre. L’album, comme la chanson, est marqué par un groove irrésistible et une fraîcheur sonore qui offre une nouvelle jeunesse au groupe après plus de dix ans de carrière.

L’enregistrement du morceau a bénéficié de moyens accrus grâce au label EMI et à l’arrivée des premiers synthétiseurs accessibles au groupe, qui jusqu’à la fin des années 1970 n’avait pas les moyens de s’offrir ces instruments. Le résultat donne un son plus pop et moderne, en phase avec l’ambiance MTV naissante ; le clip réalisé par le frère du compositeur, Paul Justman, où le groupe se retrouve entouré de jeunes femmes en uniformes de lycéennes dans une salle de classe, deviendra une des vidéos phares du jeune réseau câblé.

Le texte de « Centerfold » présente une histoire douce-amère : un homme découvre dans un magazine érotique que son grand amour de lycée est devenue playmate. Le narrateur balance alors entre nostalgie, perte d’innocence et désir, incapable de concilier son souvenir idéalisé d’« ange » adolescent avec la pin-up qu’il a sous les yeux. Le refrain obsédant :

« My blood runs cold / My memory has just been sold / My angel is a centerfold »

devient le symbole du choc et de la tentation. Ce thème « candide et sulfureux » est porté par le ton espiègle du groupe et le chant débridé de Peter Wolf.

Le J Geils Band dans les année 70

Au-delà de l’histoire, la chanson évoque la confrontation entre innocence passée et sexualité médiatisée, un rite de passage cruel mais traité ici avec humour, autodérision et un souffle adolescent irrésistible.

Anecdotes

  • Le morceau était initialement vu comme un risque par la maison de disques, mais son succès massif a surpris tout le monde et propulsé l’album Freeze Frame en tête des ventes.
  • En France, le refrain fit partie des « tubes de l’été » 1982, souvent repris sur les radios FM naissantes.
  • « Centerfold » reste classé parmi les meilleures chansons des années 80, et en 2018, Billboard la place 66e de son All Time Top Songs.
  • Lors de nombreuses tournées, Peter Wolf racontait sur scène des souvenirs fictifs de lycée pour introduire la chanson, renforçant cet aspect « confession » adolescent.
  • La vidéo tournée dans un vrai lycée de la banlieue de Boston participe à l’iconographie américaine mêlant fantasme scolaire et subversion pop.

Avec « Centerfold », le J. Geils Band signe un tube pop iconoclaste et fédérateur, aussi dansant que malicieux. Leur virage vers la new wave et la pop accrocheuse devient la bande-son d’une génération, tout en gardant une pointe de satire douce et de nostalgie adolescente. Un classique qui allie efficacité radiophonique, audace de l’époque et sens de la dérision, un « crush » musical qui ne se démode pas.

The J. Geils Band

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